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Changer des vies par l’alphabétisation en République Démocratique du Congo

À Bweremana, au Nord-Kivu, un projet développé par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et l’Organisation des Nations Unies pour…
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À Bweremana, au Nord-Kivu, un projet développé par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), enseigne aux agricultrices qui n'ont pas pu aller à l'école à lire et écrire.

Par Ben Anguandia et Helen Vesperini

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Il n'est jamais trop tard pour apprendre : Desanges pendant son cours d'alphabétisation. Photo: WFP/Ben Anguandia

Ce témoignage marque la Journée Internationale de l'éducation (24 janvier), qui nous rappelle les 258 millions d'enfants et de jeunes qui ne vont toujours pas à l'école … et célèbre les héros de l'apprentissage !

"En plus de mon travail agricole, je suis payée 25 dollars par mois pour travailler comme femme de ménage, mais mon contrat prévoit 50 dollars par mois", explique Desanges Kabuya Ndanzi. "Ce n'est que depuis que j'ai commencé à apprendre à lire que j'ai pris conscience de cela".

Desanges est une agricultrice de l'Est de la République Démocratique du Congo (RDC), qui travaille comme femme de ménage et comme vendeuse de bananes et de pommes de terre au marché de Bweremana, dans le Nord-Kivu, afin de subvenir au besoin de son foyer. A 35 ans, elle élève seule sept enfants.

Malgré le soutien de l'organisation paysanne dont Desanges fait partie, il est difficile pour elle de subvenir aux besoins de sa famille. Mais quels que soient les défis, elle veut à tout prix que tous ses enfants puissent terminer leur parcours scolaire.

Son aîné, un garçon de 19 ans, vient de terminer ses études secondaires et les suivants, des jumeaux, réussissent bien dans leurs études secondaires. Son quatrième enfant est en CM2.

Les trois plus jeunes sont les enfants de sa sœur décédée, et reçoivent une aide financière pour leur scolarité de la part d'une église locale.

Desanges surmonte sa honte de ne pas savoir lire grâce à des cours d'alphabétisation, et suit depuis six semaines une formation organisée par le PAM et ses partenaires, qui lui permet d'acquérir les bases de la lecture, de l'écriture et du calcul.

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Desanges devant l'institut. Photo : WFP/Ben Anguandia

"Chaque fois que je suis payée, je mets de l'argent de côté pour les frais de scolarité en le versant au groupe d'épargne local, car on ne peut pas surestimer l'importance de savoir lire et écrire. Je veux juste que les enfants puissent terminer l'école, trouver un emploi décent et avoir une vie décente", dit-elle.

Traditionnellement, dans ce village des rives du lac Kivu, les femmes travaillent la terre et ne reçoivent parfois que quelques années d'enseignement primaire.

"Moi-même, je ne suis pas allée à l'école du tout", explique-t-elle. "Mon père est mort avant ma naissance, et ma mère est morte en donnant naissance à ma petite sœur quand j'avais un an et demi. Les religieuses nous ont accueillies et quand j'avais trois ans, nous avons été accueillies par une dame du village qui nous a élevées, mais elle n'avait pas d'argent pour nous envoyer à l'école".

"J'ai été mariée, mais mon mari est parti il y a de nombreuses années", dit-elle, sans détour — maintenant qu'elle reçoit enfin une éducation, elle se concentre sur l'avenir.

"Je sais compter jusqu'à 50 maintenant et j'ai commencé à écrire", dit-elle.

"Avant, j'avais entendu parler de l'alphabet, mais je n'avais aucune idée de la façon dont on assemble les lettres pour en faire des mots. Je me suis inscrite au programme d'alphabétisation parce que je suis membre de l'organisation paysanne locale créée avec le soutien du programme. Les organisateurs savent que je n'ai pas peur de travailler dur dans les champs et ils ont mis mon nom en avant et ont dit que cela m'aiderait à l'avenir".

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Les agricultrices du Nord-Kivu en séance d'alphabétisation. Photo: WFP/Ben Anguandia

Cette organisation, le CAIDEV (Centre d'appui aux initiatives de développement) existe depuis 2012 et compte 80 membres, dont 63 femmes. Elle vise à permettre aux petits exploitants agricoles de mieux vivre de leurs terres. Lorsque le programme de résilience PAM-FAO a débuté en 2018, le CAIDEV faisait partie des organisations choisies pour y participer.

Desanges explique qu'on lui avait demandé de s'impliquer dans le fonctionnement du CAIDEV, mais qu'elle avait toujours refusé, gênée par son incapacité à prendre des notes.

"C'est quelque chose dont j'ai toujours eu honte, mais je pense qu'une fois ma formation terminée, je serai prête à prendre plus de responsabilités au sein de l'organisation", dit-elle.

Deux femmes membres du CAIDEV qui ont suivi la formation d'alphabétisation de 2019 ont pris des postes de direction au sein du système d'épargne de l'organisation.

Desanges est déjà convaincue que le fait de savoir lire et écrire ouvrira des perspectives. Une fois la formation terminée, elle recevra une subvention pour développer son commerce "Je veux me faire connaître ici en tant que commerçante", dit-elle.

Le programme de résilience du PAM et de la FAO à Bweremana est financé par le ministère fédéral allemand de la coopération économique et du développement (BMZ) par l'intermédiaire de la banque de développement allemande (Kreditanstalt für Wiederaufbau, KfW).

Mis en œuvre dans des zones post-conflit, le programme est axé sur le redressement à long terme et le renforcement de la résilience des ménages agricoles à travers le renforcement des chaînes de valeur agricole et la diversification des moyens de subsistance. Le volet initial, qui couvre la période de 2017 à 2021, a ciblé au total 30,000 ménages dans cinq territoires du Nord et Sud Kivu.